Contrôle de lecture sur Lîle des esclaves, de Marivaux (1725)

1. Résumez la pièce en onze phrases (une phrase pour chaque scène). (3 points)

1. Mise en place de l’intrigue : les Grecs Iphicrate et Arlequin sont naufragés sur l’île des esclaves, dans laquelle les rôles entre maîtres et valets sont inversés.

2. Trivelin, le représentant de l’île, intervient ; il explique l’origine et le fonctionnement de l’île, et prévient les deux hommes de l’expérience qui les attend.

3. Les deux Grecques, Euphrosine (maîtresse) et Cléanthis (servante) qui subissent le même sort que les deux hommes, sont soumises à la 1ère épreuve imposée par Trivelin : Cléanthis doit faire le portrait de sa maîtresse en sa présence afin qu’elle s’en repente (notamment d’être une « coquette »).

4. Trivelin explique à Euphrosine les avantages qu’elle aura à reconnaître ses torts.

5. Trivelin rencontre Iphicrate et Arlequin, et prend des nouvelles : Arlequin voudrait que son maître soit plus gai. Ils sont alors soumis à l’épreuve : Iphicrate doit reconnaître le portrait qu’Arlequin donne de lui (celui d’un « ridicule »).

6. Arlequin cherche à séduire Cléanthis, et les deux valets s’amusent à jouer le jeu de la galanterie, devant leurs maîtres qui les suivent passivement. Finalement, ils décident par eux-mêmes de mettre en place un autre défi : chaque valet va tenter de séduire le maître du sexe opposé.

7. Cléanthis prépare le « coup » en confiant à Euphrosine qu’Arlequin a des vues sur elle ; la voilà au désespoir.

8. Arlequin cherche à séduire Euphrosine, mais, pris de pitié face à son désespoir, il abandonne.

9. Même jeu qu’à la scène 7, entre les deux hommes ; même échec, mais Arlequin renonce. Les deux hommes vont jusqu’à se déclarer une amitié réciproque et à reprendre leurs rôles initiaux.

10. Les quatre personnages principaux sont sur scène, et Arlequin réussit à convaincre Cléanthis de pardonner aussi à sa maîtresse. Tous se révèlent dans leur humanité, leur sensibilité, et même leur émotivité (ils pleurent et et se prennent dans les bras).

11. Là-dessus, Trivelin arrive et constate la réussite du stratagème. Les quatre Grecs pourront repartir chez eux en ayant tiré cette leçon : les maîtres doivent respecter leurs valets.

 

2. Une utopie est un lieu imaginaire où un gouvernement idéal règne sur un peuple heureux ; en littérature, l’utopie est un récit qui invite le lecteur à réfléchir sur sa propre société, à travers la description d’un univers idéal. En quoi peut-on dire que L’île des esclaves relève de l’utopie ? (2 points)

À la scène 2, Trivelin explique le fonctionnement social et moral qui régit l’île : grâce à l’inversion momentanée des rôles (normalement pour trois ans), les maîtres prennent conscience de la dure condition des valets, de leur propre vanité, de leurs abus, et se corrigent eux-mêmes au fur et à mesure. Ils apprennent donc un « cours d’humanité » efficace, sur le principe de « se mettre à la place » de l’opprimé, pour cesser ensuite d’opprimer eux-mêmes leurs valets. Tout est montré par Trivelin comme une chance, une belle opportunité de « guérir » les vices des hommes. Aussi les choses sont-elles présentées d’une manière idéale. Le lieu constitue donc une utopie ; mais l’ouvrage aussi, car la pièce met en scène une réussite : les personnages, très rapidement, vont tirer les leçons à tirer, et tout est bien qui finit bien.

 

3. Quel est le personnage qui vous semble le plus profondément « bon », moralement ? Pour quelles raisons ? Développez votre réponse en fournissant une analyse du personnage sur l’ensemble de la pièce. (3 points)

Pour moi, c’est Arlequin ! Mais les réponses peuvent varier en fonction des lecteurs/ spectateurs… Le tout étant de justifier sa réponse avec pertinence, et en analysant suffisamment le personnage.

 

4. Relevez : (Expliquez rapidement chaque réponse) – (3 points)

– un comique de geste : à la fin de la scène 2, Arlequin fait « de grandes révérences à Cléanthis » ; il joue déjà pleinement son rôle de noble mais en en rajoutant, en en faisant trop.

– un comique de situation : à la fin de la scène 9, Arlequin « déshabille son maître », alors qu’ils viennent de s’échanger des mots amicaux pleins de bons sentiments et de tendresse, et qu’Iphicrate est même allé jusqu’à embrasser son valet. La réplique « Que fais-tu, mon cher ami ? » laisse entendre pendant un très court instant le grossier quiproquo qui pourrait naître dans l’esprit du maître à ce moment-là, mais la réponse d’Arlequin évacue immédiatement la méprise et évite de basculer dans quelque vulgarité que ce soit ; au contraire, c’est le processus de réconciliation qui se trouve parachevé avec l’échange définitif des vêtements, afin que chacun reprenne son état initial et sa liberté.

– un comique de mots : beaucoup d’expressions populaires, notamment de la bouche d’Arlequin, peuvent être citées en exemple.

– un comique de mœurs : scène 6, le « théâtre dans le théâtre », est peut-être l’exemple le plus représentatif du comique de mœurs, qui traverse en réalité toute la pièce. Voir question 5.

– un comique de caractère : à la fin de la scène 3, Cléanthis, qui jubile dans son nouveau rôle de maîtresse, ne parvient plus à s’arrêter de dire du mal d’Euphrosine. Dans ses deux dernières répliques (où elle utilise le conditionnel puis le futur), elle atténue les dernières « piques » qu’elle jette à la figure de sa maîtresse, mais c’est pour mieux en ajouter car elle n’arrive plus à se taire : plus rien ne semble pouvoir l’arrêter, malgré l’autorité de Trivelin qui le lui demande ! Cela révèle, de manière comique, un caractère immature et vengeur.

 

5. Relevez un passage dans lequel les personnages jouent eux-mêmes une comédie de la séduction. En quoi cette scène tend-elle un miroir satirique aux spectateurs de l’époque ? (2 points).

C’est dans la scène 6, lorsque Cléanthis et Arlequin jouent la scène de l’amour galant. Ils basculent avec amusement dans la caricature des nobles qui se font la cour. Or, les spectateurs de Marivaux sont pour l’essentiel des nobles qui pourraient se reconnaître dans ces clichés.

 

6. Quelle leçon morale peut-on tirer de cette comédie ? Diriez-vous qu’il s’agit d’une leçon « universelle », atemporelle ? Pourquoi ? (2 points)

La leçon morale est que les maîtres doivent respecter leurs valets, que ces derniers sont aussi dignes d’affection que n’importe quel être humain, et même davantage, dans la mesure où leur relation est en fait, au fond, privilégiée (les valets sont souvent les confidents, les complices de leurs maîtres ; ce sont aussi eux qui connaissent le mieux leurs maîtres, jusque dans leurs vices cachés). C’est, comme le dit Trivelin, une leçon « d’humanité ». Elle dépasse donc les différences entre des contextes historiques. C’est sans doute pour cette raison que Marivaux, auteur du XVIIIème siècle français, place son récit dans la Grèce antique, et pour cette même raison que nous le lisons et le jouons encore aujourd’hui.

 

7. Marivaux se situe historiquement entre deux mouvements : le Classicisme et les Lumières. Trouvez au moins une caractéristique de chacun de ces deux mouvements dans la pièce L’île des esclaves. Expliquez vos réponses. (2 points)

Caractéristiques empruntées aux Classiques : unités de temps, de lieu et d’action ; une fin heureuse (comédie classique) ; thématique des maîtres et valets ; emprunt à la Commedia dell’arte ; contexte de la Grèce antique ; idée chère à Molière que « la comédie corrige les vices des hommes ».

Caractéristiques qui annoncent les Lumières : inscription dans le genre de l’utopie, avec la description d’un lieu exotique idéalisé ; dimension satirique, critique par le divertissement ; réflexion sur la hiérarchie sociale et les inégalités.

 

8. Comparez L’île des esclaves et la pièce que vous avez lue pendant les vacances : quels sont les points communs et les différences concernant les relations entre maîtres et valets ? (3 points)

N’oubliez pas de préciser quelle pièce vous avez choisi de lire :

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