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Aucune société n’est parfaite, car elles contiennent toutes une dose irréductible d’injustice. L’ethnologie permet d’évaluer cette dose dans une juste mesure.
Il faut distinguer la démarche amatrice, empreinte de réactions émotionnelles, de celle de l’ethnologue qui cherche à élargir le champ de l’observation et de la réflexion en comparant les sociétés entre elles. Appuyons-nous sur l’exemple de l’anthropophagie, qualifiée de « sauvage » par nos sociétés. Tout d’abord, il peut s’agir d’un comportement dû à la nécessité de survivre.
Mais surtout, on ne doit pas oublier que certaines de nos coutumes – notamment celle d’emprisonner les individus dangereux – peuvent sembler tout aussi « barbares » à d’autres, compte tenu de leur cruauté : exclure un individu du groupe, l’enfermer en prison, est une pratique violente qui choquera d’autres cultures.
De même, on trouve moins de cruauté qu’on ne le pense dans certaines coutumes étrangères qu’on aurait vite fait de qualifier de « sauvages », comme celles des Indiens (par ailleurs anthropophages) chez qui la « police », après avoir détruit les biens d’un coupable, organise en contrepartie un échange de cadeaux collectifs dans lequel le coupable devient redevable à l’ensemble de la société. L’absence de contrepartie, chez nous, semble aussi incohérente qu’inhumaine.
Ainsi, l’ethnologie, par l’observation d’un grand nombre de sociétés différentes, permet de relativiser la cruauté des coutumes, y compris des nôtres, et d’atteindre le jugement le plus objectif possible.
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